Les faces cachées de l'hypnose
Pour l'anniversaire de mon livre "les énergies de l'hypnose", je vous propose une petite synthèse (et aussi de balayer quelques idées reçues) sur cette capacité de changement dont nous disposons tous
Un an que mon livre est paru, et quoique beaucoup de lecteurs et lectrices m'en aient renvoyé le plaisir de lecture qu'ils en ont eu, il n'a pas eu tout l'écho que j’en espérais, à l'exception d'un bel article dans Libération et de plusieurs interviews vidéo, dont une belle rencontre avec Lilou Macé et la chaîne ADN TV. (J'ai découvert à l'occasion de cette parution tout un écosystème médiatique autour du développement personnel et des thérapies que je ne connaissais absolument pas.) Mais les auteurs ne sont jamais content, c’est bien connu ! 😊
Pour marquer cet anniversaire, je vous propose, en deux posts, une petite promenade à la rencontre de l’hypnose — elle vous donnera un aperçu des sujets que j'aborde dans le livre. C’est une expérience que j’ai essayé de rendre aussi vivante que possible (est-ce qu’un livre peut hypnotiser son lecteur ?) tout en battant en brèche quelques idées reçues qui ont la vie dure.
L’hypnose, à vrai dire, est une faculté mal comprise, et toujours un peu mystérieuse. Oui, je dis bien une faculté, que nous avons tous, et qui est directement en rapport avec notre capacité à nous adapter au monde, donc à changer.
Si l’état hypnotique est difficile à décrire, c’est parce qu’il est une expérience du corps plutôt qu’intellectuelle. C’est sa force. C’est un phénomène universel, que l’on le rencontre dans toutes les époques, toutes les civilisations. Songer au chamanisme, aux transes rituelles, etc. Il faut comprendre que si l’hypnose semble différente d’une époque à une autre, c’est que sa pratique est indissociable du contexte culturel du temps, des croyances, des peurs, des souhaits, qui font que l’on s’en fait une certaine image, et que cela a un impact sur l’expérience elle-même. (Il y a là un phénomène de suggestion.)
On réduit parfois l’hypnose à une technique de psychothérapie, ou à un truc de spectacle. Il s’agit en réalité d’un phénomène courant, et qui n’est d’ailleurs pas propre aux humains. Des animaux peuvent être « hypnotisés ». C’est l’expérience d’un état « différent » (on parle parfois de « conscience modifiée » mais je n’aime guère cette expression). Le rôle du praticien est d’aider à l’installer, à l’approfondir et à le stabiliser (par le processus appelé « induction »), de manière que la patiente, le patient, puisse en profiter, et accéder à ses ressources inconscientes d’imaginaire et de créativité. C’est là qu’apparaissent des solutions, parfois inattendues, à ses difficultés…
Y a-t-il un « sommeil hypnotique » ? Si parfois la personne hypnotisée semble endormie, elle garde toujours une conscience de ce qui se passe, sa capacité de discernement. « L’hypnotisé reste la même personne », insistait Milton Erickson. En revanche, il est assez courant aussi d’oublier une partie de ce qui s’est passé dans l’expérience. Et c’est très bien ! À l’ère de la data et de la traçabilité, on n’oublie pas assez.
On parle parfois d’hypnose pour dire qu’on est fasciné. Le 11 novembre 2001, le monde entier a été hypnotisé par l’image des tours jumelles qui tournait en boucle sur les écrans du monde entier. Dans la mythologie antique, Méduse pétrifie qui la regarde. C’est une représentation du traumatisme qui choque, sidère, et fige la personne : c’est une hypnose négative, qui dissocie durablement. Tout à l’inverse, l’hypnose thérapeutique vise à rétablir notre flexibilité d’esprit, une circulation fluide de l’énergie, des relations spontanées avec les autres et avec soi.
Avant l’hypnose, en Europe, on parlait de magnétisme animal. C’est le terme consacré par Franz-Anton Mesmer, un médecin autrichien venu s’installer à Paris peu avant la révolution française. Dans sa consultation de Créteil, il accueillait les bourgeois parisiens, dont il traitait les maux par l’effet d’un certain « fluide » qui, selon lui, circulait entre les êtres comme une sorte d’électricité. Mesmer fut immensément célèbre en son temps (en anglais, to mesmerize est synonyme d’hypnotiser). À sa manière, il fut un précurseur de la psychothérapie de groupe. Je vous conseille vivement d’écouter le podcast de France Culture (dans lequel j’interviens) qui fait un portrait détaillé de ce personnage étonnant, haut en couleurs.
C’est aussi grâce à l’hypnose, qu’il était venu étudier en France à la fin du XIXe siècle, que le jeune Freud forgea sa théorie de l’inconscient, cette part de nous-mêmes qui nous échappe, mais qui affleure chez le sujet en transe hypnotique. Il assista aux démonstrations du célèbre psychiatre Charcot à la Salpêtrière, qui s’attachait à démontrer le pouvoir de suggestion du médecin sur ses patients en les plongeant dans une transe.
Par la suite, Freud s’efforcera de détacher la psychanalyse de l’hypnose. Il voulait que l’analyste se tienne dans une froide neutralité, qu’il se présente au patient comme un pur miroir. C’était une sorte de fantasme - ou de phobie ! Toujours est-il que l’hypnose devint taboue en France. Or pendant ce temps, aux Etats-Unis, un certain Milton Erickson ouvrait de nouvelles voies thérapeutiques en l’utilisant avec bonheur …
À suivre !
Comme c'est curieux... ou pas :-) Je savais que Marc avait écrit un livre sur l'hypnose. Et je ne l'ai pas lu. Je m'étais raconté qu'après avoir lu François Roustang il y a bien longtemps, j'en savais assez. Et voilà que ton article me donne envie de lire ton livre. Syncronicité certainement, car ton article m'a permis de comprendre plus en profondeur un effet de la séance de supervision sur un client coach ce matin ; et sur d'autres moments de coaching ou de thérapie (hors hypnose éricksonienne) : quand le client, en transe, accède à son inconscient, passe en mode rêve éveillé. Merci Marc. Je vais commander ton livre :-))
Merci 🙏 Emmanuel pour ton commentaire, qui me réjouit .. et j'espère avoir ton retour sur mon livre ! Je persiste à considérer que la compréhension de l'hypnose (qui passe par l'expérience) est un incontournable. Je tiens actuellement un petit séminaire autour de l'hypnose, pour partager avec des accompagnants, coachs pour la plupart, certaines pratiques qui ne relèvent pas nécessairement de l'hypnose formelle mais qui sont très utile, comme tu le laisses entendre. Je lancerai un nouveau groupe à la rentrée (annonce et dates à venir) et je profite de ton message pour le signaler aux lecteurs intéressés.